Afin d'atteler des voitures traditionnelles en toute sécurité, j'ai appris avec Marcel, un charron, la technique de fabrication des roues en bois ferrées à chaud.
Ces connaissances disparaissent progressivement en même temps que les ouvriers charrons qui ont excercé ce métier jusque dans les années 1950. Il est donc important d'en sauvegarder une partie.
Pour qu'une roue soit ronde et solide, il faut respecter des règles précises (angles, serrage, essence de bois, contrainte....).
C'est un travail long et précis car chaque partie de la roue est unique (jante, raie, moyeu, fer...), le travail à l'aide de machines permet de préparer les bois, mais l'ajustement ne peut se faire que manuellement.
Un dicton dit:
"la mortaise du charpentier est lâche"
"la mortaise du menuisier est juste"
"La mortaise du charron serre...."
C'est donc l'association de la contrainte au montage infligée aux différentes parties en bois de la roue en blanc, avec une anticipation sur la flexion des bois et la contrainte finale du fer posé à chaud, qui rend cette roue extrêmement solide.
Pour fabriquer une roue, il faut toujours partir du centre.....
En effet, c'est la taille de la boite (pièce métallique au centre de la roue) qui définie la taille du moyeu. Ce dernier va définir la taille des raies ou rayons (le nombre, toujours pair, va dépendre du diamètre et de l'usage de la roue). La dimension des jantes est liée à la taille des rayons (bien sûr, il y a 2 rayons par jante). Enfin, le bandage métallique est choisi en fonction de la largeur des jantes.
Pour faire une roue, il faut utiliser 3 essences de bois:
- l'ormeau tortillard pour le moyeu. La qualité essentielle de ce bois est sa résistance à l'éclatement. Il ne doit pas fendre.
- L'acacia pour les rayons. Travaillé plein fil, il a une excellente résistance aux chocs et à la compression.
- Le frêne, ou l'ormeau, pour les jantes de voitures à cheval. Ces bois, assez fibreux, résistent à la flexion des bois imposée à la roue lors du serrage par le fer.
La plupart des outils sont les mêmes que ceux du menuisier, cependant certains sont spécifiques au charron :
- la roulette permettant de mesurer la circonférence des roues
- le grand compas
les gouges
- le diviseur (pour répartir les mortaises sur le moyeu)
- la plumette (pour mesurer l'angle écuanteur de la roue)
- les rabots courbés
- les racles
Aprés avoir tourné le moyeu au tour à bois, il faut le monter sur le diviseur pour pouvoir le mortaiser. En principe, les roues avant de voiture à 4 roues ont 12 rayons et les roues arrières ont 14 rayons. Le moyeu fini, il faut le cercler avec des cordons métalliques et une frette en fer pour éviter son éclatement lors de l'enrayage.
Les rayons sont préparés, il possèdent une forme particulière. Plus fin à l'avant, ils donnent à la roue une impression de finesse et de légèreté . Plus épais à l'arrière, ils assurent la solidité de la roue.
Ils sont enrayés à chaud, à la masse. cette opération est trés importante pour la durabilité de la roue.
Les jantes, tracées sur gabarit, rejoignent les rayons grâce à des mortaises/tenons coniques, chaque jante est reliée à l'autre par un tourillon en bois.
Des coins en bois d'acacia viennent bloquer les tenons et ainsi la roue en blanc (c'est à dire la roue en bois non ferrée).
La roue en bois, seule, n'est rien sans le fer...
C'est la contrainte d'un fer dont le périmètre intérieur est plus petit que le périmètre extérieur de la roue, qui achève l'ouvrage.
Pour monter le fer sur la roue, il faut dilater la matière par la chaleur.
Pour cela, un feu de bois est allumé au sol à l'intérieur duquel est déposé le fer.
Dans la construction de la roue, le ferrage est la phase la plus rapide mais aussi la plus spectaculaire. Elle reste néanmoins celle qui nécessite le plus de dextérité et de précision.
Une fois le fer en place, il est rapidement refroidi pour être ajusté.
Suivant la taille et la fonction de la voiture, il existe différents types de roues.
Les brancards en frêne des voitures à cheval à 2 ou 4 roues doivent être mis en forme à la vapeur. En effet, il est important que le bois soit droit de fil et que le brancard possède des courbes qui permettent d'envelopper le cheval.